Ce mardi 28 novembre 2023, Sylvie a clôturé et présenté au comité de pilotage du Réseau RADiS son étude de l’accessibilité des produits bio et locaux en région dinantaise.

La distribution des produits sur le territoire est un levier indispensable à la transition alimentaire : il faut en effet pouvoir s’approvisionner facilement dans les produits bio locaux des producteurs. Cette accessibilité concerne le « qui » (qui propose des produits bio locaux en région dinantaise), le « où » (quels lieux de distribution et sont-ils accessibles point de vue mobilité ?), le « quand » (quand a lieu la distribution, heures et jours d’ouverture), le « comment » (quelles sont les modalités d’accès, de commande, de paiement…), le « quoi » (quelle est la gamme proposée par le lieu de distribution) et, enfin, le « combien » (le prix).

L’étude tente de répondre aux questions suivantes : (1) Comment renforcer les lieux de distribution actuels (épiceries, vente à la ferme…) ? et (2) Quels canaux de distribution faudrait-il développer sur le territoire pour renforcer l’accessibilité des produits bio locaux (épicerie mobile, points de distribution, autres) ?

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Résumé de l’étude

Rappel des motivations

L’étude a été réalisée afin d’identifier des solutions pour rendre une alimentation bio et locale accessible au plus grand nombre. Elle tente de répondre au Droit à l’alimentation repris dans la Déclaration des Droits de l’Homme grâce à une solution intégrale (selon Laudato Si), en prenant en compte, de front, les enjeux environnementaux et sociaux. Plusieurs solutions permettant de réduire le prix des produits bio locaux sont exposées : des aides privées et publiques pour renforcer l’accès à la terre, à des bâtiments, à des équipements, à de la main d’œuvre alternative, la réduction de main d’œuvre (mécanisation, autocueillette, glanage), la réduction de la logistique (circuit court, approvisionnement mutualisé des canaux), le choix des produits (volumes, surplus…). Cependant, les aides privées ou publiques à des canaux de distribution soulèvent la question de la concurrence avec les acteurs de vente actifs sur le territoire (interpellations d’acteurs).

Présentation des axes de travail potentiels

Le rapport présente plusieurs stratégies pouvant être développées pour améliorer la distribution des produits bio et locaux sur le territoire. La première consiste à renforcer les acteurs existants, en améliorant leur visibilité et en les conseillant sur les modalités d’accès. La seconde est de créer de nouveaux canaux de distribution, mutualisés pour les producteurs, ne portant pas atteinte aux acteurs existants. Parmi ces nouveaux canaux, l’épicerie mobile et les points de distribution sont particulièrement étudiés car ils ont été choisis par les citoyens du territoire (GT vente en 2022 et résultats du sondage).

Diagnostic de territoire

Il a permis d’inventorier et de caractériser les acteurs : 20 producteurs et transformateurs bio en vente directe, 8 épiceries proposant des produits bio locaux dans leur gamme, 5 marchés hebdomadaires, 3 marchés de terroir, 2 GAC’s et 1 point de distribution. Des statistiques socio-économiques ont été rassemblées, permettant de caractériser les citoyens par quartier/village, notamment le niveau de revenu, la pyramide d’âge et la mobilité. Une cartographie a rassemblé ces différents éléments. Enfin, un recensement des échecs et succès d’initiatives de distribution de produits bio locaux a été réalisé afin de définir les facteurs déterminants du succès, et la dynamique globale du territoire.

Sondage

Diffusé auprès des citoyens afin de recueillir leur avis sur les points de vente existants (connaissance, praticité, accessibilité) et sur des canaux de vente à venir (évaluation des différents types), il a permis de mieux cerner les habitudes de consommation (où, quand, comment, quoi…) et les possibilités pratiques (commandes, bénévolat…). Le sondage a notamment révélé la faible visibilité des acteurs existants, et un intérêt marqué pour l’épicerie mobile et les points de distribution. Une analyse fine par type de répondant (taille du ménage, occupation, mobilité…) a été réalisée.

Consultation d’experts

Différents experts sectoriels (distribution de produits locaux) et territoriaux ont été consultés afin de récolter leur avis sur la situation existante et les actions à renforcer (acteurs existants et création de nouveaux canaux de vente). L’avis général était plutôt de renforcer l’existant, plusieurs facteurs allant contre le développement de nouvelles initiatives (compétences, peu d’implication des producteurs et de dynamisme citoyen, peu d’attrait pour le bio local sur le territoire, conjoncture économique, etc.).

Rencontre de fondateurs d’épiceries mobiles

Trois fondateurs d’épiceries mobiles ont été rencontrés (Didier Sperandieu—Wallocale, Ignace Sepulchre—Ignace Produits bio et Sonia Vannier—A votre contenance). Ils représentaient des situations diverses : expériences arrêtées ou de longue durée, vente sur les marchés ou dans les villages en milieu rural… De nombreuses informations utiles pour l’évaluation de ce mode de vente ont été récoltées (choix du véhicule, réalité des marchés, prix et marges, logistique, etc.).

Analyse économique de nouveaux canaux de distribution

La faisabilité du développement de points de distribution et de l’épicerie mobile a été évaluée via une étude économique.

Logistique d’approvisionnement

En premier lieu, l’approvisionnement en produits bio locaux a été considéré, avec l’idée de réaliser des tournées d’approvisionnement auprès des producteurs. Cette solution permet de réduire de plus de moitié le temps et les kilomètres à consacrer à la logistique par rapport à une situation où les producteurs livreraient indépendamment leurs produits. Le coût de cette logistique a été évalué à 13.030 euros par an pour l’approvisionnement hebdomadaire de points de distribution en utilisant un travailleur (ou 6.550 euros avec un bénévole bénéficiant d’une contrepartie équivalente à 10 euros par heure, ou 4.390 euros pour un bénévole « gratuit »), et à 19.870 euros par an pour l’approvisionnement, trois fois par semaine, d’une épicerie mobile en mobilisant un travailleur.

Points de distribution

L’étude part d’une hypothèse de 6 points de distribution sur le territoire (un par commune), gérés par un travailleur et par des bénévoles (avec ou sans contrepartie), avec commande hebdomadaire et marge de 30 %. Elle évalue les frais de fonctionnement entre 78.331 euros et 40.251 euros l’année (fonction du type de main d’œuvre et des tâches remplies par chacun). Pour obtenir un équilibre économique, chaque point de distribution doit rassembler 11 clients (bénévolat « gratuit »), 17 clients (bénévolat avec contrepartie) ou 20 clients (logistique gérée par le travailleur et non par des bénévoles). D’après le Collectif 5C, une moyenne de 20 clients par point de distribution est tout à fait réalisable. Cette solution permet de renforcer l’accessibilité financière des produis (15 clients sur 120 peuvent, à travers la contrepartie du bénévolat, et à condition qu’elle soit légalement réalisable, bénéficier de produits bio locaux à moitié prix) et permet la création d’emploi (0,38 ETP pour la logistique et la gestion des points de distribution).

Epicerie mobile

L’étude part de l’hypothèse d’un camion adapté au porte-à-porte, réalisant des tournées dans les villages et présent sur des marchés hebdomadaires. Il est entièrement géré par un travailleur (pas de bénévoles). Les frais de fonctionnement du camion s’élèvent à 154.110 euros par an, logistique incluse. Afin d’atteindre l’équilibre financier, l’épicerie mobile doit accueillir 14 clients par heure de vente effective (hors temps improductifs), soit un client toutes les 4,3 minutes, s’il pratique une marge de 45 %, ou 12 clients par heure (un toute les 5 minutes) s’il pratique une marge de 55 %. Il est difficile d’évaluer cet indicateur, par manque de données sur les roulements habituels des commerces ambulants. Cette solution permet d’aller au plus proche des personnes isolées dans les villages (importants problèmes de mobilité en région dinantaise) mais ne permet pas de solution à l’accessibilité financière des produits (marge importante pour rentabiliser l’outil, et pas de bénévolat pouvant donner lieu à des contreparties). Elle permet la création d’un emploi à temps plein et d’un volume de 7 heures de travail par semaine pour la logistique (approvisionnement).

Conclusions et recommandations

Une analyse SWOT rassemble au sein d’un tableau les avantages, inconvénients, opportunités et menaces des différentes solutions permettant de renforcer la distribution de produits bio locaux en région dinantaise.

Des recommandations sont ensuite formulées pour le développement d’actions permettant de renforcer les acteurs existants (visibilité, accessibilité, amélioration de la gamme par achat-revente…) et développer de nouveaux canaux de vente. Le développement de points de distribution semble le mieux adapté aux enjeux et présente le moins de risques financiers. Pour l’épicerie mobile, des tests préliminaires grâce à une échoppe présentant les produits sur les marchés locaux seraient nécessaires pour évaluer l’intérêt des consommateurs. La question de l’évaluation et de la prise en compte des avantages sociaux non chiffrables est également posée. Social et économique, est-ce conciliable ?